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BikingMan Aura : 1.000 km d’ultracyclisme

Me voilĂ  en 2023 de retour pour ma deuxiĂšme participation au BikingMan Origine Aura, ma sixiĂšme course BikingMan en tout (4x finisher). Avec 1.015 km Ă  parcourir et 19.500 m de dĂ©nivelĂ© positif (D+) dans la rĂ©gion d’Auvergne-RhĂŽne-Alpes, en France, je sais que le parcours sera Ă  la fois exigeant et magnifique. Mon objectif est clair : je vise Ă  terminer le parcours en rĂ©duisant mon temps d’au moins 24 heures par rapport Ă  ma performance en 2022.

Le BikingMan : Qu’est-ce que c’est ?

Le BikingMan, c’est l’aventure ultime pour les cyclistes endurcis, hommes et femmes. C’est se lancer le dĂ©fi de pĂ©daler des centaines de kilomĂštres avec des dĂ©nivelĂ©s abyssaux, pendant plusieurs jours d’affilĂ©e et sans assistance, Ă  travers des paysages Ă©poustouflants du monde entier. Une aventure qui attire souvent des amateurs ultra-endurants, jeunes et moins jeunes, et qui, par leur tĂ©nacitĂ©, repousseront Ă  coup sĂ»r leurs limites physiologiques et mentales.

Les rĂšgles sont simples : chaque participant doit suivre le parcours dĂ©terminĂ© sans assistance externe, en passant par des points de contrĂŽle (CP), et doit terminer la course en un maximum de 120 heures, avec un chronomĂštre fonctionnant continuellement 24h/24. La course exige de pĂ©daler un minimum de 200 km Ă  vĂ©lo par jour, et chaque participant est responsable de la gestion de la nourriture, de l’eau, des rĂ©parations et du sommeil. Un Ă©quipement minimal, comme une couverture de survie, et des Ă©lĂ©ments de sĂ©curitĂ©, tels qu’un Ă©clairage de nuit, un casque, etc., est Ă©galement requis avant le dĂ©part.

Participer Ă  une Ă©preuve d’ultracyclisme Ă©talĂ©e sur plusieurs jours reprĂ©sente un dĂ©fi majeur qui exerce une pression intense sur le corps. Les transformations physiologiques qui en rĂ©sultent sont trĂšs prononcĂ©es et peuvent souvent ĂȘtre imprĂ©visibles au fil des jours.

Mais la rĂ©compense est grande : une expĂ©rience inoubliable qui pousse les limites physiques et mentales. Le BikingMan n’est pas seulement une course, c’est un dĂ©fi unique, une aventure humaine, un voyage vers l’extraordinaire.

Préparation

Mon entrainement cette saison a Ă©tĂ© pragmatique. J’ai roulĂ© Ă  vĂ©lo entre 250 et 400 km par semaine, en explorant diffĂ©rents terrains et conditions mĂ©tĂ©orologiques, Belgique oblige. J’ai cherchĂ© Ă  travailler mon endurance sans aller Ă  l’extrĂȘme, en essayant de prendre du plaisir Ă  chaque sortie. La musculation a complĂ©tĂ© mon programme, tout comme le rameur les jours oĂč le temps ne permettait pas de sortir le vĂ©lo. Ces exercices ont contribuĂ© Ă  renforcer mon corps pour le dĂ©fi Ă  venir.

Terminer le BikingMan France 2023 (1.000 km et 20.000 m de D+) 41eme et en 80 heures quelques semaines avant le dĂ©part de ce BikingMan Aura m’a donnĂ© un bon Ă©lan dans ma saison, renforçant mon mental malgrĂ© quelques traces physiques de l’Ă©preuve prĂ©cĂ©dente. Concernant mon Ă©quipement, j’ai choisi de rester fidĂšle Ă  mon Canyon Endurance CF. Bien qu’il ne soit pas parfait, il me convient pour le moment. AprĂšs trois BikingMan avec et sans changements majeurs, je sais ce qu’il peut faire.

Avant le départ

La veille du grand jour, dimanche Ă  7h du matin, la rĂ©alitĂ© commence Ă  se faire sentir. Sur proposition d’Axel (l’organisateur et directeur de course), je rejoins quelques autres participants pour un tour de chauffe avec nos vĂ©los, Ă©quipĂ©s comme pour le dĂ©part. C’est une bonne occasion de tester le matĂ©riel une derniĂšre fois, de s’assurer que tout est en ordre. Cette sortie matinale m’aide aussi Ă  rĂ©aliser que le temps sera frais au dĂ©part, et je dĂ©cide d’opter pour une tenue plus chaude. Ce choix s’avĂ©rera judicieux pendant la course.

Benoit un autre participant belge et Axel Carion lors du petit tour de chauffe.

L’aprĂšs-midi est dĂ©diĂ© au briefing, qui est toujours trĂšs dĂ©taillĂ©. Le repas du soir est lĂ©ger, sans fioritures, et je m’efforce de trouver le sommeil vers 21h.

Le départ

L’aube d’un nouveau BikingMan est toujours spĂ©ciale, mĂȘme si c’est quelque chose que j’ai dĂ©jĂ  vĂ©cu auparavant. Le dĂ©part de la boucle de 1.000 km Ă  Beaumont-lĂšs-Valence Ă  5h du matin est Ă  la fois familier et mystique. MalgrĂ© une certaine aisance qui vient avec l’expĂ©rience, il y a toujours ce sentiment Ă©phĂ©mĂšre d’Ă©tonnement, cette pensĂ©e qui traverse l’esprit : « Dans quoi je me suis encore embarquĂ©?« 

Interview quelques minutes avant le départ

LancĂ© dans la troisiĂšme vague (quelque chose d’entiĂšrement alĂ©atoire) je trouve rapidement mon rythme, entrant dans cette « bulle » de concentration, figĂ© sur la trace de mon Wahoo. Vers 8h, au km 70, je me retrouve enfin seul, si seul, en fait, que je commence Ă  me demander si je suis toujours sur la bonne voie. L’ascension du Mont Gerbier de Jonc (km 95), que je considĂšre comme le vrai dĂ©part d’un BikingMan, se dĂ©roule sereinement, malgrĂ© le tempo soutenu donnĂ© dans la vague de dĂ©part.

C’est alors que je rĂ©alise l’impensable: j’ai oubliĂ© d’emporter mon sac avec mes ravitaillements. Pas de tablette isotonique, pas de gel, pas de pain d’Ă©pice, pas de magnĂ©sium, …. Une erreur qui, il y a quelques annĂ©es, aurait pu me faire paniquer et ruiner ma course. Mais cette fois-ci, je l’aborde avec calme. Ce n’est qu’un obstacle de plus Ă  surmonter.

La vĂ©ritable difficultĂ© de cette journĂ©e se rĂ©vĂšle ĂȘtre le vent de face, implacable et constant, qui peut rapidement miner le moral. Il s’agit d’un adversaire invisible qui vous ralentit, grignotant votre vitesse et testant votre dĂ©termination. Le lac de Naussac (km 165) et les kilomĂštres qui suivent se jouent davantage dans la tĂȘte qu’avec les jambes, rendant les extensions aĂ©ro d’autant plus prĂ©cieuses pour ceux qui les avaient choisies.

C’est Ă©galement Ă  ce moment que je rĂ©alise que la course et le niveau des participants Ă  cette Ă©dition 2023 sont Ă  prendre au sĂ©rieux : le peloton est rapide cette annĂ©e, il y a de la puissance dans les jambes, le tempo est lĂ . On dirait presque qu’ils ont tous mis un turbo dans leurs pĂ©dales !

CP1

La fin de l’aprĂšs-midi marque une Ă©tape cruciale : l’atteinte du CP1 Ă  257 km. Accueilli par Thomas et CĂ©dric, l’effervescence y rĂšgne dĂ©jĂ , un mĂ©lange d’excitation et d’urgence partagĂ©es par tous les participants. Chacun est conscient du chemin parcouru Ă  vive allure, mais aussi de la route encore Ă  venir.

CP1, en pleine forme (coucou Thomas)

Je me trouve en 40Ăšme position, un chiffre qui ne me perturbe pas outre mesure. L’important, c’est comment je me sens, et Ă  cet instant, tout va bien, tant physiquement que mentalement. Il n’y a cependant pas de temps Ă  perdre, pas de place pour la complaisance.

Un plat de pĂątes rapidement avalĂ© me redonne l’Ă©nergie nĂ©cessaire pour entamer la nuit. Pendant ce temps, je recharge mes lampes, je vĂ©rifier la machine pour la prochaine Ă©tape, et fais le plein de pĂątes de fruits et poudre isotonique PunchPower, gracieusement mis Ă  disposition.

Avant de repartir, Laurianne Plaçais, la grande vainqueur de plusieurs BikingMan, vient me saluer. Elle Ă©tait simplement venue encourager les participants cette fois ; c’est ça, l’esprit de famille BikingMan.

PremiĂšre nuit

L’atmosphĂšre change Ă  mesure que le soleil dĂ©cline, et c’est dans cette ambiance crĂ©pusculaire que j’entame l’ascension du Puy Mary (km 300). Haut de 1 589 mĂštres, il s’agit du plus haut sommet du Massif Central, un gĂ©ant silencieux qui offre une vue spectaculaire sur les volcans d’Auvergne et sa mosaĂŻque gĂ©ologique. J’y Ă©tais dĂ©jĂ  passĂ© en 2022, et cela m’avait enchantĂ©. Revenir sur ces hauteurs Ă©tait du pur bonheur, bien que la fin de l’ascension ait rĂ©vĂ©lĂ© quelques signes de fatigue.

La descente, suivie du Col d’Aulac (km 330), s’est rĂ©vĂ©lĂ©e plus ardue. Le froid s’insinuait Ă  travers le jersey, l’obscuritĂ© enveloppait la route, et l’humiditĂ© ajoutait une couche supplĂ©mentaire de complexitĂ©. Ce trio impitoyable rendait chaque kilomĂštre un peu plus exigeant.

Au sommet du Puy Mary la nuit tombe

AprĂšs 90 km dans ces conditions, et contrairement Ă  mes plans initiaux, une halte s’impose. Par chance, au CP1, Benoit, un autre participant, m’avait renseignĂ© sur un hĂŽtel Ă  Riom-Ăšs-Montagnes (km 350). Mon corps rĂ©clame du repos, et j’Ă©coute cet appel impĂ©rieux. Je prends donc une douche revigorante et m’accorde une courte sieste d’1h30.

RĂ©veillĂ©, l’horloge affiche 3 heures du matin, et la route me rĂ©clame dĂ©jĂ . Je repars, les pensĂ©es tournĂ©es vers la prochaine Ă©tape, en me promettant de m’accorder une sieste dans la journĂ©e si nĂ©cessaire.

La nuit enveloppe tout, mais ma dĂ©termination reste claire et lumineuse. La course continue, et moi avec elle, guidĂ© par la passion et l’engagement, chaque coup de pĂ©dale me rapprochant de la ligne d’arrivĂ©e.

Le deuxiĂšme jour

En quittant Riom-Ăšs-Montagnes, le froid mordant de la nuit se fait sentir, bien plus que de saison. Je ne suis pas le seul Ă  avoir cherchĂ© un abri ; ça roupille ici et lĂ , dans un sas de banque, dans un parc, les couvertures de survie scintillant dans l’obscuritĂ©. Elles sont essentielles par ces tempĂ©ratures.

Je prends pour la premiĂšre fois le temps d’analyser la course sur le site et l’Ă©tat d’avancement. La bonne nouvelle, je progresse bien. Par contre, mon ressenti du premier jour se confirme : il y a du niveau cette annĂ©e, et pas seulement dans les collines !

Les kilomĂštres nocturnes en solitaire s’enchaĂźnent dans le Cantal avec aisance, la route est clĂ©mente pour le moment, et rien ne laisse prĂ©sager de grandes difficultĂ©s pendant la matinĂ©e. La nature est calme, et le doux bruit de mes roues sur l’asphalte m’accompagne fidĂšlement.

‎⁹Parc naturel rĂ©gional des Volcans d’Auvergne⁩, ⁚Espinchal⁩, ⁚France⁩

C’est en dĂ©but d’aprĂšs-midi, aprĂšs avoir passĂ© le kilomĂštre 520, que tout bascule. Comme un coup de massue, la fatigue me frappe Ă  Saint-Jodar. Plus rien dans les jambes, les bidons vides, c’est une panne totale. Je m’arrĂȘte, une pause forcĂ©e d’une heure. Reprendre la route se fait lentement, chaque pĂ©dalage est une Ă©preuve sur 40 kilomĂštres.

Comme Tadej Pogačar au tour de France 2023: I’m gone … I’m dead

Heureusement, un ravitaillement salvateur Ă  Amplepuis (km 560) en fin d’aprĂšs-midi me redonne un peu d’Ă©nergie. Je sens la vie revenir dans mes membres, et je prends la dĂ©cision de tracer vers le CP2. La route devant moi n’offre pas de grande difficultĂ©, juste 2 bosses Ă  passer et des kilomĂštres Ă  avaler en ligne droite. Seuls quelques moustiques audacieux osent me tenir compagnie.

CP2

Arriver au CP2 (km 690), avant minuit, c’est ĂȘtre accueilli comme un roi par les race angels. AprĂšs la solitude de la route, ce contraste chaleureux me rĂ©chauffe autant que le repas qui m’attend. Je m’octroie trois heures prĂ©cieuses pour prendre une douche, savourer de bonnes pĂątes, dormir 1h et recharger mes dispositifs Ă©lectroniques. Chaque minute est comptĂ©e, chaque geste calculĂ©, mais il y a dans ces pauses un confort simple et une humanitĂ© qui rĂ©confortent l’Ăąme du coureur.

Merci Ă  Neri aux Ă  tous les race angels pour l’accueil au CP2

L’ambiance au CP2 est plus calme qu’au CP1. Les participants sont plus espacĂ©s, les arrivĂ©es se font au compte-goutte, et on peut sentir dans l’air une concentration et une dĂ©termination silencieuses. Chacun est plongĂ© dans ses pensĂ©es, ses calculs, son parcours, mais nous partageons tous la mĂȘme quĂȘte.

Enfin un bon repas avant de repartir pour le reste de la nuit

En repartant vers 3 heures du matin, la route devant moi est claire. Je me fixe un objectif : viser Grenoble pour la fin d’aprĂšs-midi. La nuit est toujours ma compagne fidĂšle, et la route, tantĂŽt amie, tantĂŽt adversaire, m’attend.

Chaque checkpoint est une Ă©tape, un jalon sur cette longue route, mais plus qu’un simple point de passage, c’est un lieu de partage, de rĂ©flexion, et de reconnexion avec soi-mĂȘme et avec le reste de l’organisation. On repart de ces lieux non seulement avec les batteries rechargĂ©es mais aussi avec un esprit revigorĂ©, prĂȘt Ă  affronter la prochaine portion de cette odyssĂ©e Ă  vĂ©lo.

Le troisiĂšme jour

Mercredi, ça va piquer, et pas qu’un peu ! Au menu : plus de 8000 m de dĂ©nivelĂ© positif sur 352 km Ă  rouler, le genre de programme qui vous donne des frissons rien qu’Ă  le lire. C’est parti avec un col de Portes (km 700) pour s’Ă©chauffer de nuit, suivi au km 748 de l’ascension du Grand Colombier, au lever du soleil, une belle façon de commencer la journĂ©e. Ce col, un grand classique du Tour de France et reconnu comme l’un des plus ardus, ne me fait pas de cadeau. Les premiĂšres difficultĂ©s se font sentir rapidement : un mal au pied droit, des douleurs qui me contraignent Ă  pĂ©daler avec un seul pied, et un dĂ©nivelĂ© flirtant avec les 15% qui m’oblige Ă  poser pied Ă  terre pendant 500 m. Au milieu de l’ascension, l’idĂ©e d’abandonner Ă  cause de la douleur me traverse l’esprit. Puis je repense Ă  StĂ©phane Bahier, un triathlĂšte handisport unijambiste qui a terminĂ© une Ă©preuve BikingMan. Si lui a Ă©tĂ© capable de parcourir 1000 km, je peux envisager d’en faire 250 en me servant uniquement de ma jambe gauche. J’enclenche ma playlist, je monte le son et je me focalise sur les kilomĂštres restants avant le sommet. Je m’efforce d’ignorer tous les signaux de douleur que m’envoie mon corps. Ça fonctionne, je me surprends mĂȘme Ă  augmenter ma cadence sur les 2 derniers kms avant le sommet.

Le sommet du Grand Colombier

L’arrivĂ©e au sommet vers 8h30 me procure un sentiment de triomphe. Ma rĂ©compense sera une descente grandiose, suivie d’une pause pizza petit dĂ©jeuner Ă  Culoz (km 772). Oui, le vĂ©lo, c’est aussi une affaire de gastronomie !

Pizza Chic: 5 étoiles

Les tempĂ©ratures grimpent trĂšs vite Ă  partir de 11h, et le froid des deux premiers jours est rapidement oubliĂ© et mon rythme diminue sensiblement en dĂ©but d’aprĂšs-midi aprĂšs ChambĂ©ry. S’en suit la trilogie de la Chartreuse (Col du Granier, Col du Cucheron, Col de Porte), des panoramas Ă  couper le souffle, une beautĂ© naturelle qui vous laisse sans voix, mais aussi un puits d’Ă©nergie sans fond. À chaque coup de pĂ©dale, elle semble aspirer mes forces, et avec cette chaleur accablante, c’est un vĂ©ritable festin qu’elle fait de mon Ă©nergie. Magnifique, certes, mais impitoyable !

AprĂšs la Chartreuse, pas loin de Grenoble (km 885), je m’arrĂȘte en dĂ©but de soirĂ©e dans un restaurant indien pour manger et Ă©tablir mon plan pour les prochaines heures. Dormir quelques heures ou reprendre le vĂ©lo? Je choisis finalement la seconde option, en planifiant l’ascension du massif du Vercors de nuit, bien que conscient qu’un peu de « bon » sommeil aurait pu ĂȘtre bĂ©nĂ©fique.

Le long de l’IsĂšre

Au coucher du soleil, 30 km de piste cyclable le long de l’IsĂšre sont un passage facile et (presque) reposant. Mais aprĂšs quelques km de montĂ©e dans la forĂȘt des Coulmes (km 930) , la fatigue se fait sentir de maniĂšre intense. Des hallucinations vives se manifestent (j’imagine des PEZ gĂ©ants autour de moi !), et ma vision et mes sens commencent Ă  sĂ©rieusement souffrir du manque de sommeil.

Les hallucinations ? Des PEZ géants autours de moi.

Jean-Christophe, un autre participant avec qui j’ai gravi quelques kilomĂštres, semble aussi Ă©puisĂ© que moi. Nous cherchons ensemble un endroit oĂč dormir, mais sans succĂšs. Finalement, frigorifiĂ©s et extĂ©nuĂ©s, nous sortons nos couvertures de survie et nous nous installons tant bien que mal Ă  la belle Ă©toile sur une dalle de bĂ©ton. Nous parvenons Ă  fermer les yeux pour une brĂšve heure.

La descente vers Pont-en-Royans (km 950) en pleine nuit n’est pas des plus agrĂ©ables, il fait horriblement froid, le GPS affiche 5 degrĂ©s (sans paire de jambiĂšres, ça pique), mais un miracle se produit Ă  4h30 du matin Ă  Saint-Jean-en-Royans (km 967). « La P’Tite Boulange, » qui n’est normalement pas encore ouverte Ă  cette heure, accepte de vendre de dĂ©licieuses viennoiseries, sandwiches et cafĂ© par la porte de service. Ce ravitaillement divin rebooste mon moral et m’offre un regain d’Ă©nergie pour terminer le Vercors. Le col de la Machine ne sera presque qu’une simple formalitĂ©, et la descente du Vercors une explosion de bonheur. Cette traversĂ©e du Vercors presque entiĂšrement dans l’obscuritĂ© sera ma seule dĂ©ception ; j’aurais adorĂ© le revoir de jour. Faute de paysage, je dĂ©bride toute l’Ă©nergie et la force encore disponible, le compteur dĂ©passe les 30 km/h sur les plats, les capteurs de puissance dĂ©passant mon niveau Ă  l’entraĂźnement… Je me cale proche du rupteur pour les 50 derniers kilomĂštres jusqu’Ă  la ligne d’arrivĂ©e.

L’aube du Vercors dans les derniers kilometres

Ce mercredi se sera rĂ©vĂ©lĂ© ĂȘtre un jour de montagnes russes, autant dans le relief que dans les Ă©motions.

Arrivée

Passer la ligne d’arrivĂ©e aprĂšs 76h. Et de 4 BikingMan terminĂ©s !

À 9h00 du matin, aprĂšs 76 heures de course, je suis le 38e Ă  passer la ligne d’arrivĂ©e, avec une amĂ©lioration de 28 heures et 25 minutes par rapport Ă  ma participation en 2022. La sensation d’ivresse qui m’envahit est tout Ă  fait normale dans ces conditions, mais ce qui me surprend, c’est la pĂȘche d’enfer que je ressens. Passer cette ligne d’arrivĂ©e est du pur bonheur, un accomplissement immense que les mots peinent Ă  dĂ©crire. Accueilli en personne par Axel et tous les autres race-angels, je savoure cet instant avec une traditionnelle biĂšre Pietra et une glace Romane (merci George), les rĂ©compenses rĂ©servĂ©es aux finishers. C’est le point culminant de ma quatriĂšme aventure extraordinaire de « finisher » du BikingMan, une Ă©preuve qui m’a une fois de plus poussĂ© au-delĂ  de mes limites. Le soulagement, la joie, et la fiertĂ© se mĂȘlent dans un tourbillon d’Ă©motions, gravant Ă  jamais cette expĂ©rience dans ma mĂ©moire.

Le temps de prendre une vraie douche, d’appeler les proches, et il ne reste plus qu’Ă  rester Ă©veillĂ© encore quelques heures pour partager mon expĂ©rience dans l’Ă©mission ‘Finish Line‘, remarquablement bien rĂ©alisĂ©e par Radio Cyclo / JerĂŽme et prĂ©sentĂ©e par le talentueux journaliste CĂ©dric Ferreira.

Pas encore eu le temps de me reposer depuis mon arrivée quelques heures avant. Une interview sans filtre.

Et maintenant, comme Axel le dit toujours Ă  la fin de chaque compĂ©tition, il est temps de sortir de cette bulle de quelques jours, riche en bienveillance, en performances et en paysages magnifiques. Je retourne dans le « monde d’imposteurs« , non avec rĂ©signation, mais avec une comprĂ©hension renouvelĂ©e de ce qui m’entoure. Je me convaincs de ce monde jusqu’au prochain dĂ©fi, oĂč je pourrai de nouveau m’Ă©vader et retrouver l’authenticitĂ© de la course.

Épilogue

Au final, je suis trĂšs satisfait de ma course. MalgrĂ© quelques pĂ©pins de dĂ©railleurs, de chaussures (Mavic, j’adore vos roues, mais vos chaussures, plus jamais 😉 ) et une grosse privation de sommeil, cette aventure restera gravĂ©e dans ma mĂ©moire. Une prochaine participation n’est pas exclue, preuve de l’attrait irrĂ©sistible de ces dĂ©fis.

Je tiens Ă  remercier trĂšs chaleureusement les race-angels, Amandio, CĂ©dric, David, Didier, Jacques, Jean-Lou, Louna, Marie-Do, Neri, Sergio, Thomas, … et tous les autres. Je ne pourrai jamais assez les remercier pour leur support, leur sourire et leur dĂ©vouement. Leur prĂ©sence, leur encouragement et leur aide inestimable ont contribuĂ© Ă  faire de cette Ă©preuve une expĂ©rience humaine extraordinaire.

Merci Ă©galement, du fond du cƓur, Ă  tous ceux qui m’ont suivi et encouragĂ© de prĂšs ou de loin dans cette aventure. Votre soutien a Ă©tĂ© ma force et mon inspiration.

Extra

Parcours
Le live replay de la course : https://owaka.live/bikingman-aura-3-2023
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Matériel
Playlist

Une qui m’a apportĂ© de l’Ă©nergie pendant les ascension compliquĂ©es

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